« Les Entêtés, il m’a suffit d’en voir un seul pour être persuadée que les autres m’épingleraient tout autant. Avec la même force, la même beauté. Leur tête est légère, aérienne, fluide, et porte une enfance qui éveille la mienne, me fait du bien au corps, directement au corps, sans que je me comprenne. Ces têtes cousues en cicatrices, ces têtes d’écorchés, c’est à plaindre celui qui ne les connaît pas, ou pire refuse d’admettre la sienne. Elles parlent mieux que nous, c’est désespérant d’en être rendu à cela : savoir que ces visages griffés de tant d’amour sont nos paroles écrasées, et nous mettent sous les yeux les mots que nous ne savons pas dire…
Merveilleux entêtés !
Ils sont depuis l’éternité avec leur histoire, leur symptôme. Je discute avec eux, interroge leur énigme, et chacun me répond m’ouvrant vers une question nouvelle. Il y en a un que je préfère. Parfois je sais pourquoi, souvent, je ne sais rien. Nous en ignorons tout, mais eux, bien mieux que nous, disent ce que l’on est, et ça nous réconforte. Je ne sais pas s’il est vrai qu’on ne pardonne pas l’innocence, mais à voir ces visages cousus d’humanité, j’aimerais moi, leur ressembler, qu’on me tricautérise aussi. Savoir que des mains me recousent comme on fait des caresses comme on fait… pour aimer.
C’est, à mon sens, ce que signe, de manière infiniment tendre le travail de Christine Masduraud.
Avec ses fils, elle répare, offrant clairement une parole, là où il n’y en a pas, là où il n’y en a plus, dans ce que vivre interroge. »
Edith Azam